« Hâte-toi de transmettre »
René Char, Commune présence, in Le Marteau sans maître (1934-1935), éditions José Corti
René Char, Commune présence, in Le Marteau sans maître (1934-1935), éditions José Corti
Adepte d’un langage « excellent de précision », Alexander Kluge détaille ainsi, dans ses Chroniques des sentiments, la particularité de son expression : « j’ai deux sources à partir desquelles je renouvelle en permanence l’écriture de mes textes. Ce sont d’une part les modèles latins comme Ovide et Tacite, ou français tels que Montaigne, Gide ou Flaubert. Et ce n’est qu’après m’être, pour moi-même et dans ma propre langue, traduit en latin ou en français ce que je vois ou ce que je pense, que je suis à même de le reproduire avec justesse en allemand. […] » Il poursuit : « Vous ne pouvez pas faire passer tout ce que vous ressentez profondément dans le langage de tous les jours, et vous ne pouvez pas transformer en communication ce que vous éprouvez du fond du cœur. Mais grâce au miroir d’une langue étrangère je le rends objectif, – comme si je ne le disais pas moi-même -, de manière à pouvoir en parler, moi avec d’autres. » – Éditions P.O.L, mars 2011. Cette méthode, ce chemin que nous vous invitons à suivre, à votre tour, à travers les méandres des langages, nous l’empruntons chaque jour lorsque nous lisons les auteurs de la Grèce antique et que nous approfondissons ainsi notre étude de cette langue grecque, cette source, qui, mieux que toute autre, permet d’expérimenter l’art souverain du dire et l’inimitable séduction des approches ambiguës :
Ἡ γὰρ θεία τοῦ ὄντος φορὰ ἔοικε προσειρῆσθαι τούτῳ τῷ ῥήματι, τῇ ‘ἀληθείᾳ,’ ὡς θεία οὖσα ἄλη. Platon, Cratyle, 421β
Ποταμοῖς τοῖς αὐτοῖς ἐμβαίνομέν τε καὶ οὐκ ἐμβαίνομεν, εἶμέν τε καὶ οὐκ εἶμεν. Héraclite, Fragment 49α
Anne Sokołowska